Henri Martin-Granel (1914 – 2008)
Les vitraux de Henri Martin-Granel dans l’église d’Ussy-sur-Marne
Architecte, sculpteur, archéologue et maître verrier
Henri Martin-Granel a fait ses études d’architecture aux Beaux-Arts de Paris. A la sortie de l’école il ne s’est pas installé
comme architecte, mais s’est adonné à la sculpture sur pierre et surtout sur ivoire, en province et à Paris, prenant spécialement pour sujets des motifs religieux. En même temps, originaire de Provence, dès son adolescence, il s’était intéressé à l’histoire ancienne.
Il se livra à des fouilles dans les départements de l’Aude, de l’Hérault, et du Gard, en particulier à Mailhac (Aude) (ndlr il a publié des articles à ce sujet). Il étudia aussi les églises mérovingiennes de la région, d’origine mozarabe et d’inspiration syrienne Appelé en Tunisie, à Bizerte comme sculpteur par un ami architecte, qui avait accepté de construire la cathédrale Notre-Dame de France, il s’y rendit pour surveiller le chantier, assurer le remploi de la façade, et du porche anciens (projet abandonné ensuite) et finalement, présenta un projet très vaste de vitraux qui lui demanda trois années d’études, essais, composition et mise en place : 1950/1953.
Il s’agissait de longues fenêtre lumineuses ou plutôt de fentes très allongées, en dalles de verre représentant de hauts personnages, sur les quatre faces de ce grand édifice carré.
Après ce coup d’essai qui fut un coup de maître, Henri Martin-Granel, réalisa des vitraux, en dalles de verre uniquement, pour des églises anciennes ou nouvelles de Tunisie.
Deux d’entre elles, ont été, par la suite, transformées en un gymnase et en une école. De retour en France en 1954/1955 il s’installa à Crecy-en-Brie, dans une vieille demeure que possédait, (avant la Révolution), la paroisse de La Chapelle-sur-Crecy, et qui, reconstruite, est devenue la propriété de la famille de son épouse, de souche seine-et-marnaise. Il est père de huit enfants.
Il se consacra uniquement dès lors à son métier de maître verrier. Il a confectionné des vitraux, soit sous plomb, soit en dalles de verre, pour plusieurs églises de Normandie, et de Seine-et-Marne. Il a travaillé en 1958 pour le studium des Dominicains de Toulouse (une immense claustra en briques et verres : conception particulièrement originale de vitrail autoporteur) qui illustre bien ses compétences à la fois de maître verrier et d’architecte.
On peut citer aussi un baptistère rond dans une église neuve de Moselle, (Escherange) en dalles de verre coulées dans des cadres de ciment, formant ainsi cloison circulaire, dont l’effet artistique volontairement recherché, est aussi bien extérieur qu’intérieur. Il s’agit là encore d’une technique de mur-vitrail. Il a également travaillé, lorsqu’elle était en construction, pour le plafond de la basilique du Sacré-Cœur d’Alger (1958-1960) dans une réalisation de vaste envergure utilisant un matériau de briques et de verres de couleurs se déployant comme un ruban sur le thème du feu, symbole de l’Amour Divin du Sacré-Cœur.
Tout en poursuivant ses recherches et ces travaux importants, il travaille à des œuvres plus modestes, comme les vitraux qu’il a posés en Seine-et-Marne, en tenant compte du caractère spécifique de chaque église.
Ces vitraux sont soit en dalles de verre, soit sous plomb, figuratifs ou non. En effet, il s’intéresse à la fois au vitrail imagé et au vitrail abstrait.
Dans notre Diocèse de 1955 à 1961, il a réalisé des vitraux en dalles de verre et aussi un vitrail imagé sous plomb à l’église d’Ussy-sur-Marne.
L’Abbé HOUILLON, curé de Sammeron, chargé aussi d’Ussy-sur-Marne et de Signy-Signets, à l’époque, a fait poser deux vitraux à Sammeron et toute une série dans les deux autres églises.
Eglise de USSY-SUR-MARNE
Pour cet édifice, irrégulièrement constitué, il faut distinguer des vitraux de style différent : à motifs figuratifs et géométriques à la fois, tous réalisés en dalles de verre.
- quatre dans le mur sud de la nef centrale (0,75 m x 3 m de haut) présentant une géométrie identique de losanges avec cependant des nuances de couleurs et de figuration différentes :
le premier en entrant : dominantes violet et jaune-orangé, figurant au centre un pain et un semis d’épis d’or,
le deuxième : dominantes vert et brun présentant un calice et un semis de feuilles de vignes et de grains de raisin rouge,
Le troisième vitrail (ci-contre) aux teintes surtout bleues et violettes présente des géométries de carrés et rectangles et quatre colombes : il symbolise la montée de la prière vers Dieu annoncée par l’Eucharistie (le pain et le vin) des deux précédents vitraux de la nef. Ce dernier style de vitrail est caractéristique du style de Henri Martin-Granel.
Le quatrième vitrail situé au niveau du transept, fait pendant à un cinquième se trouvant au mur nord du transept (côté gauche du confessionnal ) mêmes motifs de fleurs stylisées rouges pour celui-ci, vertes pour l’autre, se détachant sur des fonds géométriques en dégradé de vert ou brun, sans symbolique particulière et purement décoratif.
En se tournant vers la tribune, on aperçoit un petit vitrail de style géométrique aux teintes bordeaux et brun (0,40 m x 1,50 m de haut).
Grand vitrail figuratif sous plomb dans le Chœur (l’un des rares à être signé par le maître verrier)
Dans le Chœur à trois pans, deux vitraux se font face :
A gauche, un grand vitrail double, (classé MH) du XVIe siècle, représente la condamnation de Jésus et la première chute sur le chemin du Calvaire. La Passion ainsi représentée se prolonge à droite par le vitrail figuratif de Henri Martin-Granel (environ 1,20 m x 2,50 m de haut) – Le sujet représenté est la Descente de Croix, ou plutôt Jésus remis entre les bras de sa mère, entourée de Marie Madeleine à droite, et d’un personnage à gauche : «Nicodème» ou «Joseph d’Arimathie».
Dans le haut, un fond bleu porte les trois croix du Calvaire, les deux larrons et la ville de Jérusalem. Il s’agit du seul vitrail complètement figuratif et sous plomb que Henri Martin-Granel ait réalisé en Seine-et- Marne. Il est signé HMG en bas à droite.
Henri Martin-Granel a volontairement repris les couleurs, et dessiné ses personnages dans le style du XVIe siècle pour que son vitrail s’harmonise avec celui qui lui fait face. Les teintes sont très éclatantes : rouge, jaune, vert, bleu foncé, violet. Le beau violet intense du manteau de la Vierge attire le regard au centre du vitrail et s’apparente exactement à celui de la Vierge du vitrail de la Sainte Famille, que l’on peut voir de façon simultanée sur notre gauche dans la Chapelle de la Vierge.
Cet ensemble de vitraux de l’église d’Ussy-sur-Marne est particulièrement adapté à l’édifice et à ses différentes parties aussi bien pour le dessin et les couleurs que pour la matière : simplicité dans la nef assez austère, richesse dans le chœur un peu plus orné, discrétion dans l’étroit bas-côté nord qui est plutôt une allée.
Le vitrail de Saint Authaire avec Saint Colomban est une composition du XIXe siècle. Le retable du Chœur est occupé par un tableau du Christ Ressuscité, (signé Cléret) déposé entre 1958 et 1961 – restauré en 1993/1994, ce tableau a retrouvé sa place au-dessus du maître-autel en l’an 2006.
A l’époque où Henri Martin-Granel a exécuté son vitrail «La Descente de Croix» cet emplacement était occupé par le grand Crucifix en bois présenté sur un socle dans le Chœur. Henri Martin-Granel a réalisé d’autres vitraux en Seine-et-Marne et en Seine-Saint-Denis :
- Jouarre, la Tour de l’Abbaye – deux vitraux et deux médaillons,
• Quincy-Voisins, la sacristie de l’Eglise – deux verrières,
• Maisoncelles-en-Brie, – six vitraux dans l’Eglise,
• Meaux, verrières dans la chapelle des Visitandines et église Saint-Jean Bosco (1967),
• Crécy-en-Brie, une verrière et six grands oculus dans l’Eglise,
• Aulnay-sous-Bois, chapelle d’Ambourget (1966) et ailleurs en France
• 1956 : Saint-Denis de la Réunion, cathédrale, et Royan, église Notre-Dame,
• 1958 : Lisieux, abbaye Notre-Dame du Pré,
• 1964 : Soissons, église Saint-Crépin,
• 1969 : Antony, chapelle du collège Sainte-Marie (mur-vitrail),
Et bien d’autres réalisations encore (CES, et Lycées, résidences…)
Il a créé également à partir de l’an 2000 de nombreuses œuvres pour des collections privées, avec ses deux fils, Jean-Baptiste, et Vincent, peintres tous deux.
Extrait du dépliant réalisé par l’Association Saint Authaire (septembre 2008) – Yvonne Ampen (revu octobre 2011 – édition 2014)
Sources : André BARRAULT (extraits des pages 79 à 82)
Société d’Histoire et d’Art
Diocèse de Meaux 1961
Archives de Seine-et-Marne – recherche Marie-Thérèse Najar – n°REV413.